Pour ceux que cela intéresse, voici un lien pour obtenir la traduction française du livre-maître de Von Thünen: "L'État isolé".
Je jubile car, ne lisant pas l'allemand, j'utilisais la traduction anglaise.
L'État isolé
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lundi 13 octobre 2014
samedi 28 janvier 2012
Les modèles de localisation des activités économiques
Voici le document sur "Les modèles de localisation des activités économiques" de monsieur Amor BELHEDI. Le professeur BELHEDI de l'Université de Tunis a aimablement mis ce texte à votre disposition.
La lecture de ce document est obligatoire. Il sera considéré comme le document de base en ce qui concerne les modèles de localisation.
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mercredi 18 janvier 2012
2- Localisation Agricole : Von Thünen
L'ESPACE AGRAIRE
Introduction
L'agriculture constitue une activité économique fondamentale à la fois pour l'humanité et pour la planète. Pour diverses raisons, l'approche géographique apporte des outils essentiels pour la compréhension de son état et de son évolution ainsi que pour les décisions des agents économiques impliqués dans cette activité.
Naissance de l'agriculture
Les premiers humains vivent de la cueillette, de la chasse et de la pêche. La disponibilité instable d’aliments dans leur environnement proche les conduit souvent à une vie nomade. Certaines sociétés de chasseurs-cueilleurs s'affranchissent relativement des aléas naturels par la conservation des végétaux et animaux utilisés pour leur alimentation. Quoi qu'il en soit, peu à peu, au cours de la révolution néolithique, les communautés transforment leur environnement en se consacrant à la culture de plantes et à l’élevage des animaux. Elles observent les populations végétales et animales mais s'affranchissent des conditions et des aléas naturels pour imposer peu à peu leur loi jusqu'à sur l'évolution géologique de la planète. Le rôle de l'humanité dans les changements climatiques en témoigne si besoin en était.
Les premiers agriculteurs vivent rassemblés dans des villages de 50 à 300 habitants (CAMERON 1991). Mais la naissance de l'agriculture favorise non seulement une augmentation de la population mondiale mais aussi la division du travail du point de vue social et du point de vue géographique. Certains agents économiques peuvent désormais se consacrer totalement à l'artisanat et à l'offre de certains services, leur alimentation étant assurée par des agriculteurs. Les villes peuvent aussi se développer avec une population qui se dédie plutôt à de travaux non agricoles. C'est ce que souligne Adam Smith:
Les premiers agriculteurs vivent rassemblés dans des villages de 50 à 300 habitants (CAMERON 1991). Mais la naissance de l'agriculture favorise non seulement une augmentation de la population mondiale mais aussi la division du travail du point de vue social et du point de vue géographique. Certains agents économiques peuvent désormais se consacrer totalement à l'artisanat et à l'offre de certains services, leur alimentation étant assurée par des agriculteurs. Les villes peuvent aussi se développer avec une population qui se dédie plutôt à de travaux non agricoles. C'est ce que souligne Adam Smith:
"Chez les peuples sauvages et barbares, la centième partie, ou guère plus, du travail de toute l'année, suffira pour les pourvoir de ce genre de vêtement et les loger de manière à satisfaire la majorité de la nation; les quatre-vingt-dix-neuf autres centièmes suffisent souvent à peine pour les pourvoir de nourriture.
Mais lorsque, au moyen de la culture et de l'amélioration de la terre, le travail d'une seule famille peut fournir à la nourriture de deux, alors le travail d'une moitié de la société suffit pour nourrir le tout. Ainsi, l'autre moitié, ou au moins la majeure partie de cette autre moitié, peut être employée à faire autre chose ou à satisfaire les autres besoins et fantaisies des hommes."
La révolution néolithique, entamée il y a de cela environ 10 millénaires, a donc non seulement radicalement changé la condition humaine et de ses communautés mais a aussi transformé la surface du globe. Une nouvelle réalité voit le jour : la ville, centre de services et de création de biens à même de satisfaire “les fantaisies des hommes”. Avec comme facteur majeur l'augmentation de la productivité du travail agricole, cette transformation se poursuit encore aujourd'hui.
Conquête des terres agricoles
La pratique de l’agriculture conduit les sociétés soit au défrichement des terres, soit à la conquête de terres auparavant stériles. Le paysage naturel est ainsi transformé de façon plus ou moins importante.
Cette transformation peut être mineure en agro-foresterie quand les communautés calquent la cohabitation d’espèces diverses en forêt naturelle. Elle peut être majeure quand des terres arides et même des déserts sont rendues fertiles par l’irrigation, quand des terres du plateau continental maritime sont conquises ou quand de vastes territoires sont soumis à la monoculture. Quant à la pratique de l'agriculture à la manière d'une exploitation de ressources non renouvelables, elle peut conduire à l'épuisement des terres jusqu'à leur désertification.
Cette transformation peut être mineure en agro-foresterie quand les communautés calquent la cohabitation d’espèces diverses en forêt naturelle. Elle peut être majeure quand des terres arides et même des déserts sont rendues fertiles par l’irrigation, quand des terres du plateau continental maritime sont conquises ou quand de vastes territoires sont soumis à la monoculture. Quant à la pratique de l'agriculture à la manière d'une exploitation de ressources non renouvelables, elle peut conduire à l'épuisement des terres jusqu'à leur désertification.
Importance de la géographie agricole aujourd'hui
Si en 2017 l'agriculture ne représente plus que 3% du produit intérieur brut mondial, ce secteur comprend encore 28% des emplois dans le monde. Quant-à la proportion des terres occupée par l'agriculture, elle s'élève à 37%. Ces proportions varient considérablement d'un pays à l'autre; elles varient en fonction de divers facteurs technologiques, culturels, historiques, topographiques, climatiques…
https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/SL.AGR.EMPL.ZS consulté le 19/12/2019.
https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/ag.lnd.agri.zs consulté le 20/12/2019.
L'analyse de l'évolution de ces trois indicateurs sur 30 ans permet de constater que la proportion du territoire occupé par les activités agricoles ne change pas tandis que la proportion des emplois agricoles et la contribution de l'agriculture dans le PIB diminuent sensiblement.
C'est que les progrès technologiques permettent encore de nos jours d'augmenter la productivité du travail agricole dans la logique d'Adam Smith et ainsi de libérer la main d’œuvre pour les secteurs secondaire et tertiaire essentiellement urbains. La ville s'étend alors au dépend de la campagne, ce qui met à mal l'espace agraire. Il faut alors augmenter la productivité de la terre ou coloniser de nouveaux espaces. Cette concurrence conduit parfois les pouvoirs publics à interdire l'établissement d'autres occupations sur les terres agricoles les plus fertiles. Cette politique de zonage agricole est un outil important pour garantir la sécurité alimentaire des pays.
Quartier urbain gagné sur la plaine agricole au nord de la ville des Cayes, Haïti
Depuis le néolithique donc, l'agriculture façonne directement ou indirectement l'espace géographique et les territoires. Cependant, les paysages agraires ne sont pas uniformes. C'est ce qui est traité dans ce qui suit.
Localisation différentielle de la production agricole
Les paysages agricoles varient considérablement à la surface du globe. Leur répartition fait l’objet de la géographie économique agricole. Les agriculteurs n'ont souvent pas le choix du lieu d'implantation de leur activité. Ce qui est de leur ressort, c'est le choix des cultures et des agrosystèmes, ainsi que la destination de leurs productions. Il est commode d’aborder cette problématique avec une perspective micro qui concerne les exploitations agricoles, combinée à une perspective macro qui concerne l’agrégation à différentes échelles de ces unités individuelles.
Perspective macro
À l’échelle d’une région, d’un pays ou à l’échelle planétaire, divers facteurs agissent sur les décisions de production de l'agriculteur selon l'endroit où il exerce son activité. Le climat, le relief, les caractéristiques des terres sont des conditions naturelles qui conditionnent l’agriculture. D’un autre côté, les conditions sociales comprennent les traditions et valeurs, la technologie, les modes de production, l’accès aux marchés, les rapports de forces internationales (coloniales, néo-coloniales ou autres).
L'environnement physico-biologique
Depuis la révolution néolithique, la nature conditionne la pratique de l'agriculture. Le soleil, l'eau et le sol sont trois facteurs dans l'apparition de l'agriculture et son évolution. Il n'est alors pas étonnant que le premier foyer agricole connu se trouve au Proche-Orient, dans le "Croissant Fertile", et que les autres foyers se soient développés hors des grands froids et là où l'eau n'était pas réellement une contrainte. Aujourd'hui encore, les zones polaires et les déserts ne font pratiquement pas partie de l'espace agricole.
Apparition de l'agriculture au néolithique
Par Chamois rouge — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=29090824
Ces facteurs naturels ne déterminent pas seulement la présence ou l'absence de l'agriculture. Différentes espèces ou variétés sont sensibles au climat et aux conditions pédologiques. Le caféier ne supporte pas l'hiver des pays tempérés alors que le pommier en général ne supporte pas le climat tropical.
Outre le climat et la pédologie, d'autres facteurs naturels doivent être considérés comme opportunités ou contraintes. D'importantes régions à forte déclivité sont rendues impropres aux cultures saisonnières qui laissent le sol à nu une partie de l'année. L'altitude constitue un autre facteur topographique auquel certaines cultures sont très sensibles.
L'environnement humain
La division géographique du travail
Le fait que la pratique de l’agriculture permette une division sociale du travail entraîne du même coup une spécialisation géographique des activités économiques. Ainsi, les villes se développent avec une demande éloignée des lieux de production agricole. L’offre s’adapte à cette demande et la distance du marché urbain module cette offre.La technologie
Le développement et les options technologiques influencent aussi les choix de production. L’irrigation permet de mettre en valeur des terres arides ou même désertiques. La mécanisation, en général, limite ces choix en rendant la monoculture plus adaptée à une augmentation de la productivité du travail humain. Les progrès dans le conditionnement, la conservation et la transformation des produits changent également le paysage agraire en atténuant l’effet de la distance. Il en est de même pour les moyens de transport.
Les rapports de forces internationaux
Les rapports internationaux de domination exercent aussi des contraintes sur les choix de production. La France n'aurait jamais accepté la culture commerciale de vigne dans la colonie Saint-Domingue de sorte à ne pas entrer en concurrence avec les vins de la métropole. Même l'alcool distillé produit à partir de la canne-à-sucre a été interdite par une déclaration du Roi du 24 janvier 1713, de façon à ne pas concurrencer les eaux-de-vie de vin de France (MANDELBLATT 2011). Par contre, plus tard, en Algérie, des colons de la même France essaiment cette culture dans la colonie, les vignobles de la métropole étant décimés par la phylloxéra (ISNARD 1975).
Plus subtilement, la loi des États-Unis d’Amérique interdit la USAID de financer d’autres pays pour des activités risquant de nuire à l’économie des USA (USA 2019).
La coopération internationale nord-sud n’est jamais une aide. Elle est toujours géostratégique dans le sens qu’elle est un outil de construction de l’espace de pays dominés dans l’intérêt des fournisseurs d’“aide”.
Plus subtilement, la loi des États-Unis d’Amérique interdit la USAID de financer d’autres pays pour des activités risquant de nuire à l’économie des USA (USA 2019).
La coopération internationale nord-sud n’est jamais une aide. Elle est toujours géostratégique dans le sens qu’elle est un outil de construction de l’espace de pays dominés dans l’intérêt des fournisseurs d’“aide”.
Modèle de Von Thünen
Le cours sur la localisation agricole est basé sur le modèle de Von Thünen.Résumé du modèle
Le modèle de départ de l'« État isolé » de Von Thünen prend pour acquis que :
- Une ville unique est situé au centre d'un « État isolé » et constitue l'unique marché (ponctiforme) pour les produits agricoles. État isolé signifie qu'il n'y a pas de commerce international.
- L'État est constitué d'une plaine uniforme au point de vue physique (sol, climat, topographie, fertilité etc.).
- Les conditions de transport sont les mêmes dans toutes les directions. Il n'y a pas de routes.
- Les prix sont fixés à la ville et ne changent pas.
- Les producteurs sont motivés par la maximisation de leur profit.
La rente foncière (profit) pour un produit i, à une distance d du marché est :
Ri= (pi – ci) – Ti*d
Ri : rente foncière (profit)
pi : prix du marché du produit i par unité de surface
ci : coût de production de i par unité de surface
Ti : coût du transport de i, par unité de distance pour le produit d'une unité de surface.
d : distance à la ville (marché).
Ainsi, plus on s'éloigne du marché, plus la rente foncière diminue. Mais le coût de transport n'étant pas le même pour tous les produits, les courbes de profit de 2 produits peuvent se couper. Le producteur choisira le produit pour lequel Ri est le plus élevé.
Dans l'exemple de la présentation animée :
Ra = (20 000 – 10 000) – 200 d = 10 000 – 200 d
Rb = (15 000 – 7 000) – 120 d = 8 000 – 120 d
Rc = (10 000 – 3 000) – 130 d = 7 000 – 130 d
Rd = (11 000 – 5 000) – 100 d = 6 000 – 100 d
Re = (5 000 – 2 000) – 25 d = 3 000 – 25 d
Ce qui donne le graphique suivant :
Enfin, l'État de Von Thünen avec l'effet de :
- la voie navigable ou de la route
- la petite ville
Références
CAMERON, Rondo (1991): Histoire économique du monde. Larousse, Paris.
ISNARD, H. (1975): La viticulture algérienne, colonisation et décolonisation. in: Méditerranée, deuxième série, tome 23, 4-1975. pp. 3-10.
MANDELBLATT, Bertie (2011): L'alambic dans l'Atlantique. Production, commercialisation, et concurrence de l'eau-de-vie de vin et de l'eau de vie de rhum dans l'Atlantique français au XVIIe et au début du XVIIIe siècle, in: Histoire, économie & société 2011/2 30e année, pages 63 à 78.
SMITH, Adam (1859): Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, tome I. Guillaumin et Cie, Paris.
USA (2019): ADS Chapter 225 Program Principles for Trade and Investment Activities and the “Impact on U.S. Jobs” and “Workers’ Rights”. Full Revision Date: 08/08/2019 Responsible Offices: E3/TRR and DCHA/DRG File Name: 225_080819.
Application:
Vous pouvez télécharger cette application de Philip Steadman de la Bartlett
Grad School. L'application permet de visualiser le paysage résultant de
la variation des facteurs intervenant dans le modèle de Von Thünen.
www.casa.ucl.ac.uk/vonthunen/von-thunen.zipDocuments à consulter:
1- Sur la question de l'espace en économie :
THISSE, Jacques-François: "L'oubli de l'espace dans la pensée économique"
2- Sur la question de localisation agricole, 2 documents :
BELHEDI, Amor : "Les modèles de localisation des activités économiques"
OCDE: "La conversion des terres agricoles: Dimension spatiale des politiques agricoles et d’aménagement du territoire"
3- Pour ceux que cela intéresse, la traduction française de l'ouvrage de Thünen:
L'État isolé
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